mardi 13 mai 2014

Premier marathon, c'est fait

Voilà, c'est fait, j'ai couru mon premier marathon. Enfin, pas tout à fait le premier, mais je reviendrai plus tard sur ce sujet.
C'était dimanche, entre Lille et Lens, sur une route fermée aux voitures pendant cinq heures. Et puis la vie continue.
En attendant, compte-rendu écrit aux amis coureurs. Plus tard, d'autres sensations viendront.


Hello mon ami,

Je te fais un compte-rendu de cette course très particulière.

Tout d'abord le temps ; 4h28. Bon, je suis bien content car j'ai terminé et puis, un ami m'avait dit qu'en dessous de 4h30, il me considérait comme un marathonien. Car 4h30, c'est le temps qu'a mis Oprah Winfrey pour finir son marathon après avoir maigri de 20kg et s'être dûment entraînée.

Je suis donc marathonien et bien heureux de l'être !

Mais dieu que ce fut difficile.

Départ à 9h45, on était 1500 à courir le marathon en solo et 2500 à faire le marathon en relai.
Dès avant le départ, grand vent sur le pont du départ. Je me mets derrière les meneurs d'allure de 4h15.
On se balade au début en centre-ville, avec petit secteur pavé, je garde bien mon rythme du 1er au 5ème kilomètre, sans m'emballer, avec du 6'15 au km.

Puis on file sur la banlieue. Au 7ème kilomètre, je sens une petite pointe dans le mollet droit, qui m'a bien l'air de venir tout droit de mon 10km de dimanche dernier. Hum, hum, la situation me taraude un peu l'esprit.

On est un petit groupe de 70 environ à suivre les meneurs d'allure, certains coureurs trouvent que le rythme est rapide mais tout le monde se sent bien, blague, on est pas mal protégé du vent qui souffle de 40 à 60 km/h. Je prends mes gels tous les 5km en les faisant passer avec de l'eau sans m'arrêter plus de 10 secondes aux ravitos.

Au passage au semi-marathon, le temps tombe : 2h02'… Et un des deux meneurs d'allure se marre : "on est 3' en avance". 

A la douleur au mollet droit qui s'accentue s'ajoute celle au mollet gauche. Je n'ai jamais couru plus loin que cette distance, tout ce va arriver me semble être du bonus et pourtant je me suis entraîné afin de finir ces 42 fichus kilomètres. Mais bon, il y a eu la folie de courir un 10km dimanche dernier (ceux avec lesquels j'en ai parlé ont éclaté de rire genre "non mais t'es complètement fada").

Les villages se succèdent les uns aux autres sans que je me rappelle leurs noms, rues de maisons en briques basses, identiques, des fanfares le long de la route, bonne ambiance et les gens qui t'encouragent par ton prénom (bonne idée, il est en gros sur le dossard). Des coureurs (et coureuses) nous dépassent, ce sont des relayeurs qui font de 5km chacun à 10km.

Le 24ème kilomètre me semble marquer le début de l'accélération des petits soucis. Je ne sais pas pourquoi mais je n'arrive pas à détacher mes pensées des douleurs aux mollets. Du 24ème au 30ème km, nous sommes sur une chemin goudronné de halage, avec vent d 3/4 qu'on se prend par rafales quasi continues.Sur ce chemin de quatre mètres de large, j'ai l'impression d'être dans une matrice maternelle, on est serré les uns contre les autres, je me dis qu'ils me protègent, que mes jambes ne peuvent pas être en danger puisque j'avance mécaniquement, avec une semblant de concentration sur le souffle.

Le souffle va bien, les jambes tiennent encore, je parviens à suivre les meneurs et nous passons les 30km en guère plus de 3h.

Ah les 30km… Sitôt la bannière franchie, c'est le début de la fin. Le "mur", le fameux mur me cogne sans prévenir. Pourtant j'avais pris des gels, pourtant j'avais bu tous les 2,5km mais là, les mollets se raidissent soudain tout comme les quadriceps. Dur, dur. A partir de là, je laisse partir le groupe de 4h30 (qui s'est réduit à une vingtaine d'éléments) et les drapeaux des meneurs s'éloignent inexorablement.

Le but sera de prendre mon dernier gel au 35ème kilomètre, c'est l'image mentale que je m'impose. Ne pas s'arrêter avant le 35ème, chaque kilomètre est gagné sur l'adversité, cette vache de vent qui redouble (la météo annoncera ce soir que les rafales étaient de 60km/h), ces jambes qui durcissent sans que je puisse rien y faire. 

Peu après le 35ème kilomètre, nous sommes en pleine campagne et le vent redouble d'intensité. Au vu de ma vitesse, je suis un peu projeté sur le côté de la route. La respiration est difficile face au vent et les idées noires s'accumulent. Maintenant, il faut finir et au coin d'un virage, sur une douleur intense et simultanée des mollets et quadriceps droit et gauche, un flash de douleur, je suis paralysé… et je m'arrête, pour reprendre, cinq secondes plus tard par de la marche. Il reste un peu plus de 7 kilomètres, un sacré bout de chemin. 

J'essaie de marcher en tirant les bras le plus possible d'arrière en avant et en déroulant bien le pied au sol. Evidemment, les spectateurs applaudissent les coureurs… beaucoup moins les marcheurs. Pourtant, l'effort est tout aussi réel. Avec la déception, la frustration, le sentiment le plus fort est l'envie d'en finir. Alors qu'avant je pensais à madame et aux enfants, à la bonne bouffe de ce soir, là, je n'ai plus qu'un seul désir, en terminer, arrêter de marcher, m'asseoir, ne plus avoir mal aux jambes. 

Une fois, au bout de 500 mètres de marche, j'essaie de courir… A peine 50 mètres, et mon corps se transforme à nouveau en bois durci. Obligation de s'arrêter. Sans oublier le vent qui continue à faire des siennes, le marathon se termine gentiment par une sacrée montée de 2km. Après la flamme rouge du dernier kilomètre (une éternité), j'en termine en clopinant. Ouf, c'est terminé.

Deix bêtises à corriger pour un éventuel futur marathon :- Grave erreur de courir un 10km en compétition une semaine avant le marathon. Même si je me suis bien reposé cette semaine, l'effort conséquent s'est fait sentir dès le 7ème kilomètre et le bénéfice moral d'une jolie course intermédiaire a vite fondu dès les premières douleurs pour entraîner une succession de questions et doutes qui sont allés s'amplifiant.- Grave erreur (bis) de faire le premier semi-marathon beaucoup trop rapide. 

Et puis, le vent… Bon, j'en ai déjà parlé, il est pareil pour tous mais c'est un sacré poison contre lequel il fallait lutter tout au long de la course.

Je t'embrasse.