mardi 19 novembre 2013

Duroy avec chagrin et sans pitié

Un coup de poing au ventre asséné avec lenteur et délicatesse mais dont l'impact est le même que s'il avait été donné par Bruce Lee himself.

L'effet est terrible : il dure juste beaucoup plus longtemps dès qu'il vous atteint.

C'est l'impression que j'ai eue à la lecture du roman autobiographique de Lionel Duroy, "Le chagrin".

L'auteur revient sur sa vie, depuis son enfance jusqu'à l'âge adulte, en la romançant moins qu'il ne l'avait fait dans "Priez pour nous".

Il y raconte ses jours au milieu de neuf frères et soeurs, d'une mère mal aimante, d'un père qui tire le diable par la queue, ses complexes face à ses grands frères, les séparations, le départ de la France, l'arrivée en Tunisie, les retours dans l'Hexagone. Et toujours ce père qui essaie de parer au mieux pour plaire à sa mère.

Les faits sont durs, Duroy est franc du collier. Et violent.

Il est d'autant plus violent qu'il se fait doux, parfois, l'écrivain. Par exemple, quand il nous dit qu'il regarde d'anciennes photos de ses parents à la loupe et qu'il imagine leurs pensées, ce qu'ils ont vécu, quels pouvaient être leurs sentiments. Et il en contemple souvent, des images de ses parents.

"J'imagine que mon père...", "sans doute, ma mère, à ce moment-là, pouvait penser...", "mes parents devaient avoir des problèmes...", toutes ces figures de style nous font entrer dans leur tête.

Le procédé est habile pour nouer le récit en même temps qu'il nous noue les tripes car l'auteur n'épargne rien des vicissitudes du quotidien, de son chagrin qui se construit durant l'enfance et qui le bloquera dans ses relations amoureuses jusqu'à la rencontre avec son amour actuel.

Sans pitié, Duroy l'est avec les siens quand il leur annonce qu'il va publier "Priez pour nous". La conséquence ? Ses frères et soeurs, son père et sa mère rompent totalement avec lui estimant qu'il les a trahis. Il y allait de sa survie, écrit-il pour expliquer la parution de son livre.

Résultat, je suis sorti du livre sentant l'écrivain rempli de chagrin mais ne pouvant se résoudre à la pitié pour les siens. Un témoignage bouleversant, exigeant, écrit d'une plume à la fois dure et attachante.










2 commentaires:

  1. Merci pour ce digest, je vais essayer de me procurer ce livrte - et merci aussi, surtout,, pour la question soulevee par le fait d'ecrire : l'ecrivain a-t-il le droit de jeter en pature au public non seulement sa vie privee mais aussi, par consequence directe, les vies privees de ceux qui gravitent ou ont gravite autour de lui ?
    N'y a-t-il pas, de la part de l'écrivain, un cote exhibitionniste qui aime montrer ses plaies, quitte a éclabousser de son sang les plaies des autres ?
    Nous qui-écrivons avons-nous le droit d'utiliser le mot comme une arme ? J'aimerais correspondre avec Lionel Duroy. Encore merci.

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  2. @ LiseNY : merci pour ton mot. En effet, c'est une des questions qui me meut. Que peut-on dire ? Sa vérité sur sa famille ? Toute sa vérité, à quoi ressemble-t-elle ? Le livre est sorti en 2010, il a eu un grand succès et on peut le trouver en livre de poche.

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